[critique] LA FILATURE de Renny Harlin (2016)

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Mais que se passe-t-il dans la carrière de Jackie ?

En 2014, Jackie Chan a tourné coup sur coup Dragon Blade et Skiptrace. Il avait été mentionné dans la presse people que cette année-là était une année malchanceuse pour Jackie. La qualité de ses deux films en est hélas la démonstration.

Skiptrace se veut être un buddy-movie sur fond de road-movie à travers la Chine et ses alentours. Pour Jackie, c’était aussi l’occasion pour lui de faire la nique à Rush Hour qu’il n’a jamais aimé.

Pour bien comprendre ce qu’il se joue avec cette comédie d’action, il faut remonter à la base du projet. En 2009, un nouveau projet de Jackie Chan fait son apparition sous le titre Flying Duck. On parle alors d’un film qui mêlerait intrigue policière, comédie d’action et road-movie. Au casting, on parle du duo Jackie Chan/Jet Li, mais aussi Jay Chou, Tony Leung Kar Fai. Le film serait lui réalisé par Jia Zhangke, un cinéaste plutôt habitué au cinéma d’auteur. En somme, une production totalement asiatique pour le marché asiatique !

Puis plus de nouvelles. Jackie Chan enchaîne les films comme le remake de Karate Kid et Little Big Soldier, puis annonce son retour à la réalisation avec Chinese Zodiac. Bref, le projet Flying Duck semble avoir disparu des radars. Jusqu’en 2013, où un projet fortement similaire fait son apparition sous le nom de Skiptrace. A cette époque, si Jackie Chan et Fan Bing Bing sont de la partie, la co-star de Jackie s’américanise en annonçant Sean William Scott (American Pie). Le réalisateur aussi, puisque Sam Fell (L’Etrange Pouvoir de Norman) remplace donc Jia ZhangKe. Les scénaristes sont eux aussi américains (les débutants, Jay Longino et BenDavid Grabrinski). Après plusieurs mois de galère, on apprendra finalement que Johnny « Jackass » Knoxville remplace Sean William Scott. Et Renny Harlin (Cliffhanger, 58 Minutes pour Vivre), remplace au pied levé Sam Fell au poste de réalisateur, apportant avec lui la garantie d’un cinéma décomplexé des années 90 !

Vous l’aurez compris : d’un projet purement asiatique, le film semble soudainement prendre une tournure plus hollywoodienne avec une envie irrésistible de pénétrer le marché américain en plus du marché chinois.

Avec ce vieux fantasme, Jackie Chan semble soudainement renouer avec sa pire époque 1996-2004, où il enchaînait les films hollywoodiens et des productions bâtardes comme Contre-Attaque, Mr Cool, Who Am I, Espion Amateur et Le Médaillon. Ce dernier est emblématique de l’américanisation du cinéma de Jackie puisqu’en plus d’être une production asiatique destinée au marché international, Jackie s’essayait pour la première fois aux effets numériques dans un buddy-movie (un genre très américain) où il partageait l’affiche avec Lee Evans (Mary à Tout Prix). Vous l’aviez rayé de votre mémoire ? C’est normal.

Alors disons-le tout de suite. Si Skiptrace n’atteint pas pour autant la nullité du Médaillon, il reste tout de même un divertissement de très faible qualité. Si le concept de Rush Hour était basé sur l’incapacité de deux policiers à se comprendre. Ici, on dirait que c’est la production, le réalisateur et les scénaristes américains qui ont été incapables de comprendre le concept à la base chinois. Là, où Jackie avait certainement le désir de montrer la richesse culturelle des régions provinciales chinoises avec une comédie policière à la Midnight Run. Renny Harlin et les scénaristes semblent plus inspirés par le film Very Bad Trip que part une excursion culturelle et touristique chinoise. Le montage (elliptique) enchaîne les effets de style (inutiles) précipitant le récit qui demandait plutôt à se poser par moment pour contempler les lieux parcourus par nos deux héros. Tout s’enchaîne beaucoup trop vite, rendant l’empathie impossible et finissant finalement par démolir l’alchimie entre Jackie et Johnny Knoxville. Si la caméra de Renny Harlin sait parfois prendre de l’ampleur notamment dans les séquences d’actions, la direction artistique est hélas complètement absente. Le film nous amène finalement dans des décors mille fois vus dans ce type de film (usine, entrepôt, port…). Pour le dépaysement finalement, c’est raté.

Surchargé de chansons pour faire « cool », le film s’engouffre dans la lourdeur. Pourtant, Jackie Chan, lui est toujours sympathique, quoique une nouvelle fois dans un rôle de chinois « rigide ». Sans toutefois égaler la baston dans l’entrepôt de  Chinese Zodiac, Jackie Chan, décidément très en forme, virevolte, grimpe, saute et nous offre une belle séquence d’action inventive dans une usine de poupées russes et même un dernier acte, qui semble soudainement s’élever grâce à de multiples rebondissements bien venus. Johnny Knoxville n’est pas mauvais non plus. Il offre même des expressions qu’on n’attendait pas chez lui. Il y a du potentiel chez Johnny qui ne demande qu’à être exploité ! si si !

On retiendra également la première prestation cinématographique de la sublime catcheuse de la WWE, Eve Torres, totalement absorbée par son rôle de femme Russe casse-noisette ! Dommage que son combat avec Zhang Lanxin, la kickeuse de Chinese Zodiac, ne soit pas à la hauteur du mano à mano féminin de ce dernier.

Bref, attendre un nouveau Jackie Chan est toujours excitant. Mais après Dragon Blade et Skiptrace, il serait bien pour lui qu’il se réveille et prenne soin des scénariis de ses films afin de ne pas se reposer sur des qualités athlétiques qu’il ne peut plus assumer. Etre en forme, c’est bien, mais l’utilisation constante de CGI (ratés) empêche désormais d’apprécier un spectacle « authentique » comme on a pu s’en gaver durant sa grande période.

La clé réside alors sur sa capacité à s’entourer de réalisateurs soucieux d’une vision singulière et/ou du récit. Ding Sheng vite !

Les opinions exprimées dans cette critique ne concerne que son auteur et n’est en rien représentatif de l’ensemble des membres de Jackie Chan France.

Tirry

Rédacteur en Chef. Amoureux du cinéma asiatique notamment chinois/HK. Certifié fan de Jackie Chan depuis ses 11 ans.

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